Nous voilà à l’aéroport de Whitehorse; il est 15 h 40, heure locale, le 21 juillet. Il y a trois heures de décalage avec le Québec. Comme pour chacun de nos voyages, l’arrivée dans une nouvelle contrée est toujours une expérience enivrante, à la limite surréaliste. Nous sommes, ma conjointe Nancy et moi, curieux et excités de découvrir au cours des 25 prochains jours ce « pays » de montagnes et de lacs, mais aussi un pays où il y a le soleil de minuit, des gens hors norme et une faune sauvage omniprésente : notre pays des merveilles pour cet été.
Après avoir récupéré nos bagages, nous prenons un taxi pour nous rendre au centre-ville de Whitehorse afin de finaliser quelques achats. Il y a des provisions à prendre pour nos longues randonnées et les dernières pièces de matériel, dont une bombonne de poivre de cayenne, format ours svp. Eh oui, c’est aussi une réalité au Yukon, il y a des ours : des noirs, les plus nombreux, et des Grizzlis, les plus gros.
En fin d’après-midi cette journée-là, alors que le soleil est encore très haut, nous rencontrons assez peu de circulation sur l’autoroute 1 (Alaska Highway) entre Whitehorse et Haines Junction (156 km plus à l’ouest). En effet, outre les touristes assez nombreux en été, le Yukon ne compte qu’une population de 36 304 habitants, dont 27 687 dans la capitale, Whitehorse, sur un territoire qui fait presque le tiers de celui du Québec*. Si on veut de la tranquillité, le Yukon est une destination de choix.
*En date de septembre 2012. Source : http://www.tourismeyukon.ca/Tout-savoir/Quelques-donn%C3%A9s-sur-le-Yukon
D’ailleurs, les Yukonnais sont assez fiers de cette tranquillité, ambivalents néanmoins entre le développement de leur industrie touristique et la préservation de leur mode de vie.
Haines Junction, un petit village de 800 âmes situé face au magnifique parc national de Kluane, sera notre « camp de base » pour les 11 prochains jours. Nous y avons prévu deux longues randonnées : le sentier en boucle de Cottonwood sur 5 jours (85 km) et le sentier de la rivière Slim ouest sur 4 jours (62 km aller-retour) en partie avec boussole. Entre ces deux sorties, il y aura une pause de deux jours.
N’ayant pas loué de voiture pour cette partie de notre voyage, Nancy et moi serons conduits aux départs des sentiers par notre hôte, le sympathique propriétaire de l’auberge de jeunesse Wanderer’s Inn, Martin Laniel. Martin est un gars originaire de Gatineau et, comme beaucoup de francophones provenant du Québec, il a tout laissé derrière lui pour venir s’installer au Yukon et y trouver un mode de vie plus proche de ses convictions. Pour cela, il a dû faire des sacrifices : un boulot stable et une vie tracée d’avance pour se lancer plutôt dans cette aventure improbable. Le Yukon compte d’ailleurs une communauté francophone bien établie, avec près de 5 000 personnes. Se faire servir en français au Yukon est chose facile. L’association franco-yukonnaise a un bureau et une permanence à Whitehorse et publie un journal français, L’aurore boréale, qui est distribué gratuitement un peu partout sur le territoire.
Parc de Kluane (prononcé Klou-â-ni)
Avant de décrire nos randonnées, je prendrai quelques minutes pour vous parler du parc national de Kluane, qui compte une réserve naturelle reconnue par l’Unesco. Avec les parcs voisins de l’Alaska et de la Colombie-Britannique, le parc et la réserve de Kluane constituent le plus vaste territoire protégé au monde chevauchant deux pays. Ce parc est aussi le territoire des Premières Nations que sont les Tutchones du Sud. Le parc et la réserve ont une superficie de 22 000 km2, ce qui en fait l’un des plus grands parcs du Canada.
Géré par Parcs Canada, il abrite les montagnes St Elias, lesquelles représentent les plus hauts sommets du pays dont le fameux mont Logan (5 959 m). Celui-ci s’élève à seulement 230 m de moins que le Denali en Alaska, plus populaire mais moins exigeant à gravir que le mont Logan. Outre ce dernier, les montagnes St Elias abritent le mont St Elias lui-même (5 489 m), situé à la frontière du Yukon et de l’Alaska, le mont Lucania (5 226 m) et le mont King (5 173 m) pour ne nommer que ceux-là.
Le parc de Kluane possède aussi l’un des plus grand champs de neige et de glaces hors pôles au monde.
Armand Comeau
Armand est un adepte de plein air depuis plus de 25 ans. D’abord actif en ski de fond et en vélo de route, c’est en 1997 que la montagne l’attire par l’ascension des sommets québécois. Détenteur d’un baccalauréat en sciences de l’activité physique et d’une maîtrise en administration des affaires, c’est en 2008 qu’il explore davantage des sommets aux États-Unis et ailleurs dans le monde. En 2010, il se rend au Népal pour réaliser un trek de deux semaines dans les Annapurna. En 2011, ce sont les Rocheuses canadiennes puis le sommet du mont Blanc à Chamonix en 2013. Se succèdent les sommets et les longues randonnées : les Rocheuses (en ski), les Alpes pour la randonnée, le GR20 en Corse, le Laugavegur en Islande, le Yukon en arrière-pays, les Chic-Chocs, la Traversée de Charlevoix, le Sentier des Caps, etc. Il guide à quelques reprises dans les montagnes Blanches et suit des formations spécialisées en carte et boussole, premiers soins.