En pensant aux 6C, la même image me revient toujours : une mère et sa fille ado qui s’apprêtent, pieds nus dans des sandales, une casquette sur la tête et une bouteille d’eau à la main, à monter vers le premier point de vue du sentier des Nymphes, alors que je reviens du km 4, mes bâtons aux mains et mon sac d’un jour sur le dos. Est-ce moi qui suis suréquipée, ou elles qui manquent de prudence? Après tout, elles seront de retour dans une heure! Non?
Pour une sortie-promenade à deux ou plusieurs dans un parc peu accidenté et très fréquenté, le contenu du sac importe plus ou moins. Mais dès qu’il est question d’une vraie randonnée, en région sauvage ou éloignée des grands centres, sur un sentier dont seules les balises témoignent de la civilisation, planification et prévoyance s’imposent. On sait quand on part, on ne sait pas toujours quand on va revenir. Il faut donc être prêt à assurer sa sécurité, quelles que soient les conditions et les circonstances.
Généralement attribuée à Dave Canterbury, ancien militaire américain, fondateur de l’école de survie Pathfinder School et vedette d’émissions de télé-réalité, l’expression originale 5Cs of survival faisait écho aux 5Cs of analysis, of marketing, of effective communication et autres acronymes. À l’origine, elle désignait 5 pièces d’équipement commençant par la lettre C, indispensables à la survie en milieu naturel. Avec le temps, en français, les verbes ont tendance à remplacer les noms, et on y a ajouté « Communiquer » pour arriver aux 6C de la survie. Soit Couper-Contenir-Chauffer-Couvrir-Communiquer-Corde.
Pour chaque C, je vous propose des exemples non exhaustifs du matériel, et des principaux besoins qu’il couvrira en cas d’urgence. On apporte sur soi ou dans son sac au moins un item de chaque catégorie, ou deux de préférence.
Couper : couteau de camp, couteau de chasse, couteau suisse, scie, hachette, couteau de cou, outil multifonctions, etc.
Besoins: Couper du bois pour faire un feu, couper des bandes de vêtements pour faire un pansement, couper la nourriture, celle qu’on apporte et celle qu’on récolte, couper des branches pour dégager un espace, ouvrir un passage, tailler un allume-feu, construire un abri, creuser le sol, se défendre des animaux menaçants.
Contenir : gourde, poche à eau, bouteille en inox, petit chaudron (popote), sac de cueillette, sac ziploc, sac à dos pour porter le matériel, etc.
Besoins: Recueillir de l’eau là où on la trouve, la faire bouillir pour la purifier, la transporter avec soi. Récolter des fruits, des champignons, des plantes comestibles, de l’écorce, de la sève.
Chauffer : allumettes, briquet, pierre à feu et grattoir, allume-feu, bougie chauffe-plat, et autant que possible : réchaud à bois, à alcool ou à gaz (et le carburant de ces deux derniers), etc.
Besoins : Faire un feu qui servira à faire bouillir de l’eau, cuire ou réchauffer de la nourriture, éclairer et rassurer dans l’obscurité, éloigner les animaux, signaler sa position, et bien sûr se réchauffer.
Couvrir : Coupe-vent, chapeau, casquette ou tube cache-cou, chaussettes, gants (pour réchauffer les mains ou les protéger) poncho ou vêtement imperméable, couverture de survie, grand sac poubelle de type jardin, etc.
Besoins : Ces objets ont pour fonction d’assurer la régulation thermique. Même en été, le temps peut changer brusquement, une averse de pluie ou de neige arriver sans avertissements. Être exposé au froid devient dangereux en quelques heures à peine. Les vêtements couvriront une partie du corps, alors qu’une bonne couverture de survie servira à isoler un blessé, construire un abri étanche, réchauffer une ou deux personnes. Son côté brillant renverra la chaleur, ou servira à attirer l’attention des secours. Le grand sac poubelle permettra de ramasser une grande quantité de petit bois, isolera du sol humide ou mouillé; rempli de feuilles ou de mousse, il deviendra un matelas d’urgence. Coupé en bandelettes, il pourra servir à maintenir un bandage, à signaler son passage en accrochant celles-ci aux branches.
Communiquer : téléphone, oui, mais pas besoin d’aller bien loin pour perdre le réseau. Le Sentier national, par exemple, serpente bien au nord des grands centres, en région montagneuse, et un téléphone ne sert plus alors qu’à se prendre en photo! Sifflet à bonne portée, miroir de signalisation, vêtement ou grand foulard de couleur voyante, lampe, papier et crayon, etc.
Besoins : Tous ces objets pourront servir à se signaler, puisqu’il est surtout question de communiquer avec d’éventuels secouristes. Papier et crayon serviront à laisser une note si on est perdu et qu’on se déplace. Il faudra y inscrire la date et l’heure de son passage, de même que toute information pertinente. Il convient également d’apprendre les signaux conventionnels de détresse et de demande d’aide, et les techniques pour indiquer sa présence, vue du sol ou des airs.
*Dans Communiquer, il ne faut pas oublier de transmettre à un ange gardien avant de partir : le nom du sentier à parcourir, la route ou le chemin qui y donne accès, le lieu approximatif de bivouac, la date et l’heure du retour. En cas de non-retour, c’est l’ange gardien qui communiquera les coordonnées à la police et/ou aux secouristes.
Corde : il est souvent suggéré de se munir de paracorde, parce qu’elle est légère et solide, et que ses noeuds se défont assez facilement. Mais une bonne corde de nylon, un rouleau de ficelle, de la corde de sisal, etc. pourront dépanner dans la plupart des cas. Prévoir un minimum de 10 mètres.
Besoins : Remplacer un lacet, une sangle de sac à dos, suspendre une bouteille ou popote au-dessus du feu, lier ensemble des branches pour les transporter, construire un abri de matériaux naturels, fixer la couverture de survie ou le poncho pour construire cet abri, fabriquer une attelle, un garrot si on en connaît la technique, laisser des bouts de corde en balise pour indiquer son passage, fixer du matériel sur le sac à dos, suspendre sac à dos ou nourriture hors de portée des prédateurs.
La liste qui précède doit bien sûr s’adapter à la météo, la saison, le lieu, la taille du groupe, l’âge et la condition physique des randonneurs, les compétences, expériences et habiletés de chacun. Avant tout, il est essentiel de connaître son matériel et savoir l’utiliser.
Un ou deux items reliés à chaque C feront toute la différence s’il nous arrive de nous perdre, ou si nous devons passer beaucoup plus de temps que prévu en forêt. Pour réduire le poids et l’encombrement, un même objet pourra avoir plus d’un usage. Certains articles non listés ici viendront compléter le bagage du randonneur, c’est à suivre! De toute façon, le plus important demeure ce qu’on a dans la tête!
Teacher SBD
Enfant, c’est en famille qu‘elle a connu le camping rustique et les promenades en forêt. Adolescente, elle emmenait son équipe de guides dans les bois au moindre congé. Adulte, c’était les camps, les excursions, les couchers à la belle étoile avec ses guides et avec ses amies. Puis son mari et ses deux enfants sont arrivés, elle les a initié aux plaisirs de la vie dans la nature, tout en poursuivant une carrière de prof d’anglais au primaire (Teacher!). Aujourd’hui, elle parcourt les sentiers, dormant sous son abri de toile en toutes saisons. Membre du forum Instinct-de-survie.ovh depuis 2013, elle fait maintenant partie de son équipe d’administrateurs; elle collabore également au magazine français Survival. La longue randonnée en autonomie, elle en rêvait depuis le premier lean-to du SIA aperçu quand elle avait 9 ans, et c’est principalement sur l’incomparable Sentier national qu‘elle poursuit ce rêve encore et encore.
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