Je connais la fabuleuse région de Mégantic pour ses hauts sommets que j’ai eu le privilège de monter à quelques reprises dans les dernières années. Je connais également son lac, si agréable à pagayer en paddle ou en kayak, du printemps à l’automne. Toutefois, lorsque j’ai pris connaissance du « Petit Compostelle Mégantic », j’ai eu envie d’en connaître davantage. Je me suis donc inscrite au grand tour, d’une durée de 6 jours. Afin de minimiser les coûts reliés aux hébergements, j’ai décidé de partir avec une amie.
Dès mon arrivée à Val-Racine, j’ai stationné ma voiture, ouvert la portière puis, j’ai respiré à pleins poumons l’odeur de la campagne environnante. C’est avec ce sentiment de bien-être instantané que j’ai su que j’étais au bon endroit.
L’accueil chaleureux de Chantal Ladouceur, la gestionnaire du chemin, avec les recommandations d’usages nous ont grandement sécurisés. Nous voilà donc mon amie Johanne et moi sur le chemin de Franceville. Un beau 11km marché sur une route de terre battue où le silence est roi et maître et un moment idéal pour se remettre à jour dans nos nouvelles respectives. Nous quittons ce chemin pour le petit sentier du « marécage des Scots » suivi de quelques kilomètres sur une piste gravelée, entièrement en forêt. Finalement, nous empruntons le parc « Walter Mackenzie » bordant la rivière au saumon jusqu’au village de Scotstown. Journée de sentiers en nature, complètement déconnectée de la civilisation. Nous avons adoré.
L’hébergement de Scotstown est un incontournable de la région. Il fut jadis une banque, transformé en gîte depuis 2020. Le sous-sol a été converti en dortoir pouvant accueillir des groupes de marcheurs et le deuxième étage offre trois chambres complètes, décorées avec goût. C’est sous l’immense ventilateur de la pièce principale que nos vêtements humides ont trouvé asile.
En face de l’ancienne banque se trouve l’épicerie du village, réputée pour leurs viandes et saucisses maison. Nous en avons profité pour nous procurer un souper et nous acheter quelques provisions pour notre dîner du lendemain.
L’imper fut de mise tout au long de la deuxième journée. Le chant des oiseaux, les gouttes de pluie se déposant sur la toile de notre imper (tic-tic-tic…) et les rares véhicules passant de temps en temps sur la route nous ont accompagnés. Johanne et moi, avons respecté le silence de l’une et l’autre sans difficulté.
Nous sommes arrivées à La Patrie en fin d’après-midi afin de rejoindre notre réservation dans un Airbnb, en face de l’église datant de 1908. Le village comptait heureusement une épicerie complète dans laquelle nous avons pu acheter notre souper du soir, une bouteille de rouge et le dîner du lendemain. Nos chaussures et vêtements trempés ont trouvé refuge au-dessus des calorifères avec l’espoir de les reprendre séchés le lendemain. C’est ici que nous avons apprécié l’investissement mis dans la qualité de notre équipement. À notre grand bonheur tout était sec et comme neuf le lendemain matin. Vive la laine de mérinos!
Au jour 3, les chemins sillonnant la campagne avec de jolis points de vue comblent notre journée. Nous avons eu la chance d’observer des empreintes d’ours et de ratons laveurs sur le sol humide. Moments particuliers, où nous avons pris conscience de notre vulnérabilité à travers cette grande nature. Nous avons parcouru pendant quelques kilomètres un sentier frontalier connu de la région jusqu’au fameux « sentier du rêveur ». C’est ici que nous avons apprécié la diversité des chemins.
Petit arrêt au « dépanneur » afin d’acheter quelques victuailles pouvant faire office d’apéro. Quel bonheur d’être accueilli chaleureusement à l’intérieur d’une maison plus que centenaire, ou le confort et la bonne table sont au rendez-vous. Après 25,1 km, ce fut hyper apprécié.
Le quatrième jour se déroule sous un ciel immaculé. Journée propice au silence et au recueillement. Sur ce chemin, la vue sur les montagnes est époustouflante. Le chemin de Piopolis entre Val-Racine et Piopolis est particulièrement éprouvant, parce que la route est ponctuée de grandes montées et de descentes. Heureusement, les bancs se multiplient pour nous offrir des aires de repos afin de souffler un peu. Je tiens à préciser qu’aux abords des routes asphaltées, l’accotement en petit gravier est suffisamment large pour y marcher en toute sécurité. Mon amie et moi ressentons de la fatigue principalement due à l’accumulation de kilomètres parcourus cette journée-là.
De toute cette aventure, Piopolis est à mon avis le village le plus charmant. Tout y est sympathique. De son dépanneur au quai de la marina, de l’église de campagne aux maisons joliment décorées. À chaque heure du jour, on peut y entendre le clocher retentir. Le bonheur de loger et de se restaurer à la même adresse après une longue journée, nous a été plus que bénéfique.
Au jour 5, nous nous sentons presque à la fin de notre aventure. Rangs et chemins de campagne nous dévoilent le Lac Mégantic dans toute sa splendeur. Nous avons eu la chance de discuter avec une sympathique dame qui nous a invités à voir ses animaux, ce qui nous a donné l’occasion de nous reposer un peu. Discussion fort intéressante et « sensible » sur le sens de la vie.
La pluie s’est invitée à la fin de notre journée, quelques minutes avant notre arrivée à Baie des Sables. Hébergement de base et repas de type « fast food ». C’est lors de cette dernière nuit passée dans la région que je me suis mise à réfléchir à tout le chemin parcouru jusqu’à présent et à faire une rétrospective de mon aventure jusqu’ici. Je me suis endormie à la lumière de mon cellulaire, avec le sentiment du devoir accompli.
Pour notre dernière journée, nous avons traversé la ville de Mégantic dont on connait les événements tragiques du 6 juillet 2013. La ville s’est refait une beauté depuis en intégrant des infrastructures nous rappelant les faits de cette effroyable nuit. La dernière étape de ce périple traverse la ville pour se rendre au parc de la Croix. Cette fameuse Croix dont la première illumination remonte au 16 décembre 1950, surplombe la ville et les montagnes tout autour. Je n’ai pas assez de mots pour vous exprimer à quel point nous avons ressenti une belle et grande énergie nous imprégner à notre arrivée à ce parc, qui signait la fin de notre aventure. Une parenthèse importante dans nos vies respectives.
Dans son ensemble, ce chemin dans la région de Mégantic est magnifique, car nous sommes constamment entourés de nature, de verdure et de hautes montagnes. Il nous offre la possibilité d’explorer ce qu’est un pèlerinage ou un chemin de longue durée, avec ses détours et bifurcations sur des rangs de campagnes où peu de véhicules circulent. Cette marche est propice au recueillement dans le calme. Le silence, les décors, l’ambiance et l’atmosphère, tout y est. Ce chemin est également intéressant pour tous ceux qui désirent parcourir un chemin plus « sportif » en raison de ses imposantes montées et descentes.
Notre aventure en 6 jours :
Jour 1 : Val Racine à Scotstown. 21,4 km
Jour 2 : Scotstown à La Patrie. 23,5 km
Jour 3 : La Patrie à Notre-Dame-des-Bois. 25,1 km
Jour 4 : Notre-Dame-des-Bois à Piopolis 25,2 km
Jour 5 : Piopolis à Baie-des-Sables 20,6 km
Jour 6 : Baie-des-Sables à Lac Mégantic 12,4 km
TOTAL : 128.2 kilomètres
Le « Mini Compostelle Mégantic » demeure un des chemins le plus marché au Québec. Différents circuits, variant entre 2 à 6 jours vous sont offerts. Il est possible de parcourir ce trajet de différentes façons : seul, en duo, en famille, en groupe, avec pitou, à la course, etc. Les hébergements doivent être réservés à l’avance. Le service de transport est également disponible.
Michelle Gaudet
Fondatrice et administratrice de « Marcher autrement au Québec »
Active et vivante, tout ce qui concerne le plein air la passionne. Le kayak de mer, la planche à pagaie, la marche de longue durée, le trekking en montagne, les randonnées pédestres, en bottes, en raquettes, en crampons. Les marches, nordique et afghane, le yoga, la méditation zen, tibétaine et vipassana. Curieuse de nature, elle aime aller à la rencontre des gens, découvrir le terroir québécois et admirer les mammifères marins du Saint-Laurent. Elle se plait à dire qu’elle n’a pas assez d’une vie pour réaliser tous ses projets et aspirations. « Marcher Autrement au Québec » est une de ses plus belles réalisations.