Qu’est-ce qui peut pousser quelqu’un à parcourir le Québec dans le but de compléter une liste précise de sentiers de randonnée? On a tous une théorie là-dessus. Une chose est certaine, ces randonneurs aiment les défis.
En tout cas, Ibrahim El-Helou a dû faire preuve d’imagination pour obtenir son Certificat du randonneur émérite québécois. C’est en partie grâce à sa « tête de mule », me dit-il, qu’il a pu compléter les 25 randonnées dans 10 régions différentes, nécessaires pour l’obtention du niveau Bronze du Certificat.
Cette liste de randonnées à compléter vise à faire des marcheurs des randonneurs émérites. Il existe trois niveaux : bronze, argent et or. Selon le nombre de sentiers parcourus, vous recevez un certificat à votre niveau.
Chez Rando Québec, nous recevons les formulaires et émettons les certificats. Lorsque la candidature d’Ibrahim est arrivée, nous étions épatés : sur ses 25 destinations, il aura eu recours au moins 7 fois à du transport en commun ou du covoiturage. En découvrant le Certificat du randonneur émérite québécois, Ibrahim a eu envie de relever le défi.
« Pour moi, c’était comme une révélation sur une activité que j’aime énormément : la randonnée. C’est une activité qui m’énergise et me ressource, me [permet] de me connecter à la nature et de m’attacher à la terre. »
J’ai rencontré Ibrahim dans un petit café montréalais. Il est arrivé au Québec en 2001, alors qu’au Liban, la paix était fragile.
Dans ce petit café bruyant, je lui demande comment il a commencé à s’intéresser à la randonnée. Il me raconte son adolescence dans les Hautes-Montagnes libanaises et toutes ses sorties en tant que scout. Fascinant! Il sort même de son sac sa liste de randonnées au Québec, sur laquelle il a inscrit, pour chaque lieu, la date de réalisation.
« Ma première randonnée était en septembre 2005. C’est au printemps 2005 que j’ai trouvé la revue Marche Randonnée [aujourd’hui Rando Québec] et, pour moi, c’était vraiment une belle découverte. Il y avait à l’époque à l’intérieur un fascicule qui présentait les activités de randonnée. »
C’est ainsi qu’il découvre le club de marche JASS et commence des expériences de groupe sur des sentiers. Il continuera aussi à découvrir des parcs en utilisant le transport en commun. Il aura mis environ 2 h 30 pour se rendre au parc-nature du Cap-Saint-Jacques! Mais le jeu en vaut la chandelle, il est charmé par le parc et ses paysages si près de la ville.
« C’est quelque chose de très précieux et j’insiste. »
Photo (à gauche) : tirée de la collection du Groupe CJC – Tripoli, Liban.
Encouragé par cette expérience, il ira en autobus, en octobre 2008, s’aventurer du côté d’un autre parc sur la rive sud de Montréal, en Montérégie.
« Je me retrouvais là à attendre le bus tout seul. Je n’avais pas de cellulaire dans ce temps-là, je me fiais aux données que j’avais écrites sur un bout de papier qui indiquait OK, ça va passer à ce moment-là. »
Ensuite, l’arrivée de Communauto aura beaucoup aidé à son autonomie. Éventuellement, il a pu s’acheter une voiture et partir plus loin à l’aventure.
« Ça m’a permis de profiter davantage et d’aller plus loin. Je me suis rendu jusqu’à Saint-Félicien. Du côté du Bas-Saint-Laurent, jusqu’à l’île aux Lièvres. Chaque fois qu’on visite un endroit, on découvre l’endroit, l’histoire, le pays et qui il est. »
La randonnée, pratique culturelle?
Pour Ibrahim El-Helou, oui, la randonnée peut être quelque chose de culturelle.
« Je présume que certains immigrants viennent de pays où on ne pratique pas beaucoup la randonnée; pour qui une sortie, c’est juste pour se balader, pour se reposer, et non pour faire un effort. Ce n’est pas nécessairement quelqu’un qui fait de la randonnée depuis son jeune âge avec ses parents. »
En souriant, il se rappelle un souvenir.
Dominique Caron
Après un baccalauréat en communication, Dominique flirte longtemps (et encore aujourd’hui) entre le monde du plein air et de la culture. D’origine abitibienne, c’est à Montréal qu’elle complète son DESS en journalisme et se lance dans la belle aventure de la vie de pigiste. Elle pratique aussi la photographie, d’ailleurs ses amis lui reprochent souvent de prendre un peu trop de photos (et de poser trop de questions) Dominique est responsable du contenu chez Rando Québec.