Courrier des randonneur.ses
Chaque édition de notre revue, notre chroniqueuse Danielle Landry répond aux questions des lecteurs concernant la pratique de la randonnée et du respect de l’environnement. Elle agit comme consultante pour le programme Sans trace et est la fondatrice de De ville en forêt.
Comment en faire plus pour protéger la biodiversité?
Pour cette édition spéciale, je tente de répondre à ma propre question. Sachant que les bienfaits que les humains retirent du contact avec la nature sont largement reconnus par les adeptes de la randonnée que nous sommes, il n’y a pas de doute que notre état de bien-être général bénéficie de l’environnement naturel. Je me suis donc demandé s’il y avait moyen de retourner la pareille au monde naturel en veillant sur sa santé. J’ai tout de suite pensé à la science participative, qui peut se pratiquer tout en randonnant.
Saviez-vous qu’il y aurait environ 80 000 espèces identifiées au Canada et que ce nombre devrait continuer d’augmenter puisqu’il resterait encore beaucoup d’espèces inconnues? Certaines espèces ont déjà disparu et d’autres pourraient cesser d’exister sans que nous le sachions. Le rapport intitulé « Espèces sauvages 2020 », qui porte sur la situation des espèces au pays, démontre l’importance de repousser les limites des connaissances pour parvenir à renverser le déclin de la biodiversité.
La science participative vient justement à la rescousse de la nature en nous permettant de collecter une quantité insurpassée de données et de les partager avec les scientifiques du monde entier. Grâce à notre téléphone ou à notre tablette, il est dorénavant plus facile pour vous et moi de prendre des clichés de nos observations et de les enregistrer, quel que soit l’endroit où l’on se trouve.
J’ai découvert l’application gratuite iNaturalist lors de mes randonnées dans les Appalaches. J’ai pu ainsi contribuer à ma mesure au suivi des changements constatés le long de l’Appalachian Trail. En effet, les scientifiques de l’Appalachian Mountain Club veulent connaître les impacts du climat sur la végétation, et les informations recueillies sur la faune aperçue sur le sentier les aident à brosser un tableau plus large des changements qui s’opèrent dans la région. Lors de votre prochaine randonnée d’une journée ou plus de l’autre côté de la frontière, vous pourriez également enregistrer des données pour les aider.
Mon vrai coup de cœur, je l’ai eu pour l’inventaire participatif de la biodiversité des sentiers de Charlevoix. Il a été lancé le 1er avril dernier. « Toutes ces informations permettront de mieux gérer le territoire pour que les paysages de Charlevoix restent habités d’une biodiversité d’exception », souligne l’organisme Sentiers Québec-Charlevoix, dans iNaturalist. Tenez-vous bien : 1 502 observations ont été enregistrées et 633 espèces ont été identifiées en trois mois seulement! Si vous passez dans le coin, allez faire votre part pour répertorier les espèces connues et méconnues de la région. Nul besoin de connaître soi-même les espèces, seulement d’avoir l’œil aiguisé pour les repérer!
Ma préférence va toujours aux projets de science participative dont la portée est concrète en matière de conservation, de gestion, ou d’action politique. En tapant les mots-clés « science participative » ou « science citoyenne » sur votre navigateur, vous vous lancerez à l’exploration du vaste champ des possibles. Prenons, par exemple, les différents projets parrainés par le Centre de la science de la biodiversité du Québec qui sont recensés sur le site Québio. C’est là que j’ai repéré le projet Carapace de Conservation de la nature Canada. J’y ai appris que six des huit espèces de tortues du Québec sont en situation précaire. L’organisme compte sur nos signalements pour mieux cerner la problématique de la mortalité des tortues sur les routes et pour poser des actions qui aideront leurs populations. Pensez-y, la prochaine fois que vous prendrez le volant!
Pour finir, parlons des corvées de nettoyage de vos sentiers préférés. Ocean Wise vous propose d’inscrire votre corvée et de remplir une fiche de recensement des déchets. L’organisme compile l’ensemble des données sur les types de déchets et les communique aux chercheurs et aux décideurs politiques. Ce sont des données essentielles pour lutter contre les emballages de plastique à usage unique. Les détritus de plastique se fragmentent en microparticules et libèrent des substances toxiques en se dégradant dans les milieux naturels.
La nature n’est pas un produit dont on peut faire l’usage; c’est l’autre part du vivant dont nous devons prendre soin.
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