Le mot de Rando Québec
Lors de vos nuitées en camping sauvage, il est important d’établir votre campement sur une surface durable et de minimiser votre impact sur votre environnement (plus d’infos). En l’absence d’installations désignées pour la préparation des feux de camp, merci de respecter les interdiction de feux à ciel ouvert. Avant de repartir, assurez-vous de ne rien laisser sur votre lieu de campement (déchets, nourriture) et d’éteindre votre feu. Dans tous les cas, avant de vous rendre sur le sentier, il est recommandé de prendre contact avec le gestionnaire du sentier afin de connaître les interdictions en vigueur (feux de camp, camping sauvage). Bonne rando!
J’aurai vécu 72 heures sur le Sentier national sans rencontrer personne, sans entendre ni voix humaine ni écho de la civilisation, à ne dépendre que de ma détermination, mon expérience et mon équipement. Bien sûr, je rapporte des photos et des vidéos, mais le souvenir le plus profond de cette immersion intense dans la nature, je le porte en moi, avec moi. Jusqu’à ma prochaine longue randonnée en autonomie sur le Sentier national.
Jour 1
Je stationne mon auto à l’accueil Catherine de la réserve faunique Mastigouche et m’enregistre pour obtenir mon droit d’accès, gratuit pour les randonneurs. Puis dans un second véhicule, mon mari me dépose à l’entrée du sentier du lac Joe, là où prend fin le sentier Chériore. Je pars d’un bon pied, mon chien en laisse devant moi et mon sac de 16 kg sur le dos. Ce tronçon du Sentier national dans Lanaudière est ouvert depuis 2012 seulement, mais une grande partie de son tracé emprunte un très ancien chemin forestier ouvert par les travailleurs de la Mastigouche. Dès le premier kilomètre, le sentier longe la rivière Mastigouche Nord, dont les cascades se jettent bientôt dans le Petit lac William. Encore deux kilomètres sur un sentier large et plat, et voici déjà l’intersection de la route 20. Quelque 100 mètres plus loin, les hautes herbes trempées de rosée me font regretter de ne pas avoir enfilé mes guêtres.
À peine une éclaircie devant le premier lean-to*, où j’ai dormi très souvent, et il faut de nouveau avancer dans les broussailles. Le sentier oblique vers le nord, laissant voir des collines à droite et des carrés de mousses et de lichens à gauche. Une passerelle, bancale mais solide, traverse un torrent chantant, qui invite à faire une pause au soleil.
À partir du km 4, le sentier traverse une forêt dense en longeant toujours ce ruisseau aux eaux claires et nous amène au premier barrage de castor, avant de bifurquer sur un sol plus sec parmi les grands conifères et redescendre vers le lit du ruisseau au-delà de l’étang envahi d’herbes jaunes. Il serait tentant de monter le camp dans cette vaste étendue, où l’eau et le bois mort attendent à portée de main, mais le sol humide parcouru de veines boueuses s’y prête mal.
Encore quelques centaines de mètres sur un sentier herbeux, avant de m’arrêter sur une percée moussue parmi les arbres. Une grande roche plate me permet de cuire mon repas sur le feu de bois de façon sécuritaire. J’installe mon abri sur la mousse, refais la provision d’eau au ruisseau, suspends le sac à ours et passe la nuit directement sur le sentier.
Aucune trace de civilisation, ni refuge, ni chaloupe, ni pylône, ni avion.
Jour 2
Le soleil monte au-dessus des arbres et sèche mon abri de toile pendant que je boucle mon sac et fais disparaître toute trace de mon bivouac. Au km 5, après avoir serpenté parmi les épinettes, le sentier semble disparaître. Plus de balises sur les arbres, plus de traces au sol, même plus d’odeurs pour guider le chien. Il faut observer, consulter la carte et la boussole, repérer le moindre indice laissant deviner le tracé du sentier, et continuer d’avancer en gardant des repères.
Au bout de 75 minutes de marche incertaine, parmi les catherinettes* et le pigamon*, d’une passerelle à l’autre, je débouche sur une aire de marche plus large et moins encombrée, et la borne du km 6 me rassure enfin. Cet épisode d’hésitation et de piétinement confirme le besoin d’entretien d’un sentier peu fréquenté et le difficile travail des bénévoles qui parrainent chaque segment. L’ancien chemin forestier que je parcours allègrement me fait découvrir un étang à orignal envahi par le myrique baumier* et noyé de soleil, où l’air circule librement, chassant un peu l’humidité de la forêt.
Une pause repas devant le lac Michaud, puis au km 7,5 c’est le bucolique lac Pioui serti de grandes roches plates qui réjouit la vue et permet de refaire le plein d’eau claire. Un bivouac aux abords du lac était prévu, mais comme les nuages s’amoncellent et laissent craindre un lendemain pluvieux, pour un itinéraire plus exigeant, il vaut mieux continuer plus loin aujourd’hui.
À partir du km 8, le sentier large et plat circule dans une érablière à bouleaux jaunes. Dans une flaque de boue, des traces de cerf, de coyote, de raton-laveur et d’ours témoignent une fois de plus que le Sentier national serpente en région sauvage. Le chant omniprésent des oiseaux, une odeur passagère de mouffette rayée, des bleuets à peine mûrs, des champignons gorgés d’eau complètent le décor. C’est tout près du lac Joe, dans une petite clairière entourée de bouleaux blancs, que je m’installe pour un deuxième bivouac. Disposer en cercle des pierres rondes, ramasser du bois mort bien sec, allumer un feu pour le repas du soir, encore une fois suspendre le sac à ours, puiser de l’eau au ruisseau qui alimente le lac et j’accueille la pluie qui durera toute la nuit.
Jour 3
Au matin, le ciel hésite entre soleil et nuages. Je traverse la route 2 et pénètre dans une forêt bien dense. Les milieux alternent : sapinière, érablière, bétulaie*, pessière*, et forêt mixte soutiennent l’intérêt de la découverte. Vers le km 11, un point de vue indiqué sur la carte permet d’entrevoir un lac sans nom au pied d’un flanc montagneux. Le temps incroyablement humide rend l’avancée fatigante, mais les baies, champignons et plantes forestières pointillent agréablement le chemin.
Plusieurs centaines de mètres après le km 12, au détour d’une courbe du sentier qui descend vers le lac Morage, apparaît le deuxième lean-to. Ce sera mon lieu de bivouac pour ce soir, car le sol inégal ne permet pas d’y installer le couchage. Une nuit en hamac offrirait une autre option parmi ces innombrables épinettes.
Peu après mon arrivée au lac Morage, la pluie tambourine sur le toit de tôle de l’abri, et bientôt le soleil revient, pour couvrir d’or les herbes aquatiques. Cette grande surface ondoyante, cernée jusqu’aux berges d’une forêt mixte, sera sans contredit le clou de la randonnée. Aucune trace de civilisation, ni refuge, ni chaloupe, ni pylône, ni avion. C’est le cœur de la forêt boréale qui palpite devant moi. J’en scruterai l’orée pendant 45 minutes dans l’espoir d’apercevoir un orignal qui viendrait y boire. Pas de feu ce soir, le sol tourbeux de la pessière m’oblige à sortir le réchaud, car la moindre braise peut couver pendant des jours dans cette terre noire avant de déclencher un feu de forêt lent et dévastateur.
Jour 4
Je me lève tôt, alertée par le cri du huard sur le lac Morage. Après avoir franchi sur une passerelle le ruisseau qui l’alimente, la balise du km 13 confirme qu’il faudra encore une fois avancer à l’aveugle dans les hautes herbes mouillées, mais cette fois sur une courte distance. Puis le sentier se met à monter doucement et régulièrement pendant près d’un kilomètre, visitant une grande diversité de couverts forestiers. Je contourne un très long rocher intrigant coiffé de végétation.
Après le km 14, la marche devient plus rapide jusqu’à la jonction avec le sentier Tonnerre qui continue dans la réserve vers le nord. Il ne me reste plus que la descente de 700 mètres, pour revenir vers le chalet d’accueil où m’attend mon auto et boucler cette longue randonnée en autonomie.
teacher sbd
Enfant, c’est en famille qu‘elle a connu le camping rustique et les promenades en forêt. Adolescente, elle emmenait son équipe de guides dans les bois au moindre congé. Adulte, c’était les camps, les excursions, les couchers à la belle étoile avec ses guides et avec ses amies.
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